Amr est agent des médias pour la Société du Croissant-Rouge palestinien. Comme c’est aussi le cas d’un grand nombre de ses collègues, sa vie et celle de ses proches ont été bouleversées par le conflit en cours à Gaza. Nous avions raconté l’histoire d’Amr une première fois lorsque sa famille et lui ont fui le nord de Gaza pour se rendre à Khan Younis. Nous avons repris contact avec lui un an après l’intensification des hostilités.
Une année s’est écoulée et cinq déplacements ont eu lieu pour Amr et sa famille qui, comme près de deux millions de personnes à Gaza, sont en quête constante d’un endroit où se mettre à l’abri.
Au cours de l’été, après avoir quitté Rafah, ils ont pu retourner à la maison partiellement détruite du frère d’Amr, à Khan Younis. Ils ont réparé deux des pièces de la maison pour s’y installer.
Pour Amr, tous les matins se ressemblent : il se lève tôt et se démène pour trouver de la nourriture et transporter de l’eau pour sa famille. Une tâche qui prend beaucoup de temps et qui est physiquement difficile. Même pour les personnes qui disposent d’un revenu, soit un salaire mensuel souvent inférieur à 300 dollars, chaque jour est une lutte pour se procurer des produits de première nécessité : aujourd’hui, un kilo de tomates coûte environ 13 dollars et une boîte de 30 œufs, 30 dollars.
« Cela signifie que même les ingrédients les plus élémentaires deviennent des produits de luxe que de nombreuses familles ne peuvent plus s’offrir », déclare Amr.
Concilier le travail et la vie de famille
Amr se rend à son travail où il garde des traces écrites des interventions humanitaires de la Société du Croissant-Rouge palestinien. Par exemple, son travail peut consister à documenter les répercussions d’une explosion à la suite de laquelle la salle d’urgence de l’hôpital Al Amal de la Société du Croissant-Rouge palestinien a été submergée de personnes blessées, ou encore, à consigner de l’information sur les activités de sensibilisation menées par les membres du personnel rémunéré et bénévole de la Société.« Lorsque je rentre chez moi, mon travail est loin d’être terminé. Mon frère et moi consacrons beaucoup de temps à la réparation de la maison. Notre objectif est de créer un milieu de vie sécuritaire pour nos enfants. Nous devons nous débarrasser des objets tranchants en métal et d’autres matériaux dangereux afin de leur assurer un endroit sûr pour jouer et se reposer », explique Amr.
« Nous sommes entourés de milliers de personnes déplacées qui proviennent des différents quartiers. Elles ont fui ici et vivent maintenant en plein air, dormant et cuisinant sans toit pour se protéger. Même la région d’Al Mawasi est remplie de monde, possiblement des centaines de milliers de personnes, si bien qu’il est impossible de trouver une place pour soi. C’est horrible. »
Les répercussions sur la santé des enfants
Selon les données de l’Organisation des Nations unies, 1,9 million de personnes ont reçu l’ordre de se déplacer dans une zone de 48 kilomètres carrés. Cela signifie que cette zone, qui ne dispose pas des infrastructures d’une ville, compte parmi les plus densément peuplées au monde. Il en découle une importante surpopulation qui se traduit par la précarité de la situation de ces innombrables personnes vivant dans des tentes ou sous des bâches, alors que les eaux usées non traitées et les eaux d’égout s’écoulent dans les rues et que les articles d’hygiène manquent.Ces conditions de vie favorisent la propagation des maladies à un rythme alarmant.
« Mes enfants ont été exposés à de nombreuses infections et maladies au cours des derniers mois, ce qui a considérablement nui à leur santé, et bien évidemment, nous n’avons pas réussi à leur trouver des traitements », raconte Amr.
« Ma fille Maria avait une petite blessure au pied. La plaie est restée ouverte pendant plus d’un mois faute de traitement adéquat : l’infection et la poussière contaminée en empêchaient la cicatrisation. »
La femme d’Amr propose régulièrement des activités pour aider les enfants à apprendre ou à jouer, mais ces derniers n’ont pas la possibilité de poursuivre leurs études ou de jouer avec des enfants de leur âge.
« Même s’il existait un établissement d’enseignement, dans ce chaos, le temps consacré à l’apprentissage est un luxe que nous ne pouvons pas nous permettre », précise Amr, en ajoutant que des classes improvisées ont été mises en place dans certaines zones, mais que les familles hésitent à envoyer leurs enfants à quelques kilomètres de chez elles, de peur de devoir évacuer à nouveau.
« Maria n’a plus de plaisir à jouer. La guerre lui a volé son enfance. Ses jouets se résument désormais à des pierres et à du sable. »
Pour en savoir davantage sur Amr et sa famille :
Survivre dans l’incertitude : une famille de Gaza fuit Khan YounisLe quotidien d’Amr à Gaza : une histoire de conciliation entre famille, travail et survie
Le personnel bénévole et rémunéré de la Société du Croissant-Rouge palestinien offre des services médicaux dans les hôpitaux et dans les postes médicaux, en plus d’offrir des services d’ambulance, de diffuser des messages de santé publique et de proposer du soutien psychosocial aux personnes à Gaza. De plus, les membres des équipes de la Société assurent la coordination de la réception et de la distribution de l’aide essentielle, procurant de la nourriture, de l’eau, des médicaments et d’autres articles de secours aux personnes dans le besoin. Ils accomplissent ces tâches tout en s’inquiétant pour leurs proches et en vivant eux-mêmes dans des conditions difficiles où ils courent de grands risques.
Les personnes souhaitant offrir leur aide peuvent verser un don au Fonds de secours : Crise humanitaire au Moyen-Orient.